23 Mai Les Ibedji de Dominique Zinkpè
« Ibedji au Nigéria, Hôhô au Bénin, Vénavi au Togo et au Ghana. Le mot Ibedji résume le culte des jumeaux. Si mon œuvre en parle, c’est notamment parce que j’étais étonné que ces 4 pays partagent les mêmes traditions culturelles.
Comme ces petites statuettes que l’on voit souvent, un homme ou une femme, régulièrement utilisé dans le culte des jumeaux, j’ai été inspiré par ces « poupées », j’ai cherché à comprendre pourquoi on leur vouait un culte. Je les trouve particulières parce qu’elles ressemblent à un être humain. Sans aucune cérémonie, c’est une représentation d’être humain tout simplement.
L’histoire du culte des jumeaux est une histoire douloureuse mais qui est célébrée d’une manière heureuse et porteuse d’espoir. Les Ibedji sont en rapport avec la disparition des enfants jumeaux auxquels on accorde une grande importance lors de leur naissance.
Dans l’opinion collective, la naissance de jumeaux était un miracle de la vie parce qu’à cette époque la science n’était pas développée comme aujourd’hui, on ne comprenait pas comment une femme pouvait mettre au monde plus d’un enfant à la fois.
A la mort de l’un ou des deux jumeaux, on fabrique des « poupées » pour les remplacer auprès des parents endeuillés. Ces derniers leur donnent un nom, leur font un lit, les habillent comme si les enfants n’étaient pas décédés.
Enfant, je trouvais ce spectacle ridicule, mais c’est en grandissant que j’ai compris la valeur de cette tradition. J’ai été interpellé en tant qu’artiste parce que je trouve que c’est une belle histoire et que c’est formidable de réussir à transformer la douleur en joie.
Maintenant, d’un point de vue plastique, je trouve relativement belle la forme d’un homme et d’une femme sculptée dans du bois. Je les prends comme essence brute de sculpture et je leur donne une écriture contemporaine. Dans mon travail, les jumeaux peuvent devenir un avion, un bateau, l’homme de pouvoir, tout en respectant le sens des Ibedji.
Je me suis également intéressé aux Ibedji car je suis Agossou, ce qui veut dire : « né à l’envers ». C’est comme cela que nous appelons les enfants nés par le siège. Traditionnellement on estime que les enfants nés par le siège sont les aînés des jumeaux parce qu’ils n’ont pas fait le cycle normal des autres enfants. Ils sont donc catégorisés comme chefs des jumeaux. »
Extrait de l’entretien de Dominique Zinkpe 2017 – Fondation Zinsou – Réalisé par Vanessa Dehelt, Josiane Chahounka et Sophie Zinsou
Partage de Territoires du 21 avril au 25 août 2017, ouvert tous les jours sauf dimanche, entrée gratuite